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La succession du dirigeant dans une entreprise familiale

May 2017

La préparation de la succession du dirigeant d’une entreprise familiale est l’une des missions clés de son conseil d’administration, car peu de décisions sont aussi importantes pour sa réussite et sa pérennité. Certaines entreprises familiales ont mené des processus de succession exemplaires et d’autres moins. L’objectif de ce document est de décrire les approches les plus courantes en la matière et d’en analyser les meilleures pratiques1.

Les sociétés familiales conduisent les successions avec une grande diversité d’approches, qui s’explique par la taille, l’histoire et la complexité de la famille, l’implication du conseil de famille, le contenu éventuel de la charte familiale, le profil des héritiers potentiels et enfin l’aptitude du conseil d’administration à mener un tel processus.

La succession du dirigeant — la mission clé du conseil2.

Nommer un nouveau dirigeant est rarement une tâche facile. Elle peut être traumatisante et éprouvante si un solide processus de succession et une préparation attentive ne sont pas mis en œuvre. C’est généralement au président qu’incombe la responsabilité de trouver un consensus entre les membres de la famille pour parvenir à une solution satisfaisante. Les décisions doivent être partagées et acceptées pour éviter que les membres du conseil d’administration ou du conseil de famille ne se blâment mutuellement en cas de résultats décevants.

Trouver le dirigeant d’une entreprise familiale implique la recherche de qualités qui sont souvent spécifiques à ce type de société et qui vont au-delà des compétences habituelles. Il devra savoir gérer, outre les contraintes de l’activité et celles du marché, les attentes des membres de la famille, qu’ils fassent partie de l’équipe de direction, du conseil d’administration ou qu’ils soient simplement actionnaires non impliqués dans la vie de l’entreprise.

Même si les candidats les plus légitimes à priori sont ceux de la famille, l’éventualité ou la possibilité que le plus adéquat n’en soit pas membre, doit être ouvertement envisagée. La nomination d’un dirigeant extérieur à la famille s’avère parfois plus probable lorsque la société est déjà passée dans les mains de générations successives, à moins que n’aient été formé certains de ses membres à diriger un groupe familial.

Les six règles d’or pour organiser la succession du dirigeant d’une entreprise familiale

  1. Avoir un alignement étroit et un dialogue ouvert tout au long du process entre la famille, le conseil d’administration et la direction générale.
  2. La situation de chaque entreprise familiale étant unique, le modèle de transmission de pouvoir doit y être adapté.
  3. La succession du dirigeant ne peut pas être traitée hors du contexte de la succession du président, s’il y a dissociation.
  4. La gouvernance doit assurer une séparation claire des rôles entre le conseil de famille, le conseil d’administration et la direction générale.
  5. La charte familiale doit prévoir la marche et les règles à suivre pour l’organisation de la succession. Elle doit traiter également du développement des membres de la prochaine génération dans le cadre de la préparation des successions à long terme.
  6. La dissociation des fonctions de Président et de Directeur Général facilite la conduite du processus de succession.

Un dirigeant externe à la famille doit montrer sa capacité à assimiler sa dynamique et sa culture. Souvent, l’échec d’un recrutement externe dans une entreprise familiale tient moins à une insuffisance de compétence qu’à une incapacité à gérer les attentes et les aspirations de la famille et à en comprendre l’ADN.

Le lien entre gouvernance et succession du dirigeant

L’efficacité de la gouvernance et de ses processus de décision sont des facteurs clés dans le succès de la conduite de la succession dans les entreprises familiales. Nos recherches sur celles qui ont été les plus réussies, ont mis en lumière plusieurs facteurs de succès:

  • Un modèle de gouvernance transparent avec une séparation claire des rôles entre le conseil d’administration, le conseil de famille, et le dirigeant et une charte familiale exposant la marche et les règles à suivre pour l’organisation de la succession du dirigeant.
  • Des administrateurs indépendants au sein du conseil d’administration apportant une vision extérieure et neutre, de l’objectivité aux délibérations du conseil d’administration, et un contrepoids nécessaire lorsque le dirigeant est un membre de la famille. Certaines familles peuvent préférer utiliser des conseils indépendants externes pour les challenger et soulever les questions difficiles, plutôt que d’utiliser leur conseil d’administration.
  • Un président du conseil qui dirige l’organisation de la succession du dirigeant en cas de dissociation et qui veille à impliquer, au moment approprié, les différents actionnaires dans le processus de sélection.
  • Un comité de nomination chargé de revoir régulièrement les options pour faire face aux vacances imprévues, plutôt que de se laisser surprendre.
  • Une évaluation rigoureuse des candidats potentiels qui apprécie, notamment l’adéquation de l’expérience, les résultats antérieurs atteints, le potentiel, les besoins en développement et l’adéquation culturelle. Cette évaluation étant conduite par des experts extérieurs reconnus pour le sérieux de leur méthodologie.
  • Un terme clairement défini pour le mandat du dirigeant permettant de s’assurer de façon périodique que ses compétences sont toujours en phase avec la nature changeante de l’activité et des challenges et d’adresser un message clair aux talents émergents au sein de la société, que leur potentiel d’évolution n’est pas bloqué.

Succession du dirigeant traitée comme un processus continu

Plus la succession est anticipée, plus nombreuses seront les options le moment venu. Sur la base de la stratégie de la société peut être défini le profil du prochain dirigeant permettant d’identifier les successeurs potentiels. La préparation de la succession du dirigeant peut être l’occasion d’un débat stratégique opportun.

Certaines sociétés ne traitent de la succession du dirigeant que lorsque la question arrive à l’ordre du jour. D’autres, au contraire, anticipent en mettant en place un processus structuré afin de ne pas être pressés par le temps et n’avoir que trop peu d’options ou risquer de perdre des cadres prometteurs.

Les conseils d’administration les plus prévoyants voient l’organisation de la succession du dirigeant comme un processus continu. Elle figure régulièrement à leur agenda dans le cadre de leur politique de développement du management. « La succession du dirigeant est constamment au centre de nos préoccupations », déclare un président. « Nous ne voulons pas être stressés par le temps, nous préférons maîtriser le processus en continu ». Un autre administrateur constate que le conseil d’administration « discute formellement deux fois par an des options de succession du dirigeant et des membres du comité exécutif. Dès qu’un nouveau dirigeant est désigné, nous commençons à penser à son successeur ». Ce point a été repris par un autre président qui implique dès le départ le nouveau dirigeant dans la préparation de son successeur : « Dès que le nouveau dirigeant prend ses fonctions, on commence à réfléchir au profil du dirigeant suivant. »

Où rechercher le prochain dirigeant ?

La question clé pour une entreprise familiale dans la préparation de la succession de son dirigeant est de savoir si le conseil a décidé d’associer ou de séparer la propriété de la direction de la société.

Nos études montrent que les sociétés familiales qui ont passé la troisième génération ou au-delà relèvent toutes de l’une des quatre catégories décrites dans l’encadré ci-contre dans la façon de concevoir le cadre de la succession.

Quelles sont les qualités requises pour un nouveau dirigeant ?

Les présidents, avec lesquels nous avons discuté, sont unanimes pour dire qu’un futur dirigeant doit avoir une vision, une réelle aptitude à diriger, une vraie motivation et du leadership, et ce, qu’il soit membre de la famille ou qu’il vienne de l’intérieur ou de l’extérieur de l’entreprise. Pour un non-membre de la famille, il est essentiel de montrer une grande sensibilité aux subtilités et à la culture de la famille : le dirigeant doit adhérer à l’objet, aux objectifs et aux valeurs de la charte familiale qu’elle soit implicite ou explicite.

« Le futur dirigeant devrait avoir un vrai leadership démontré dans une ETI, apporter une réelle capacité de management acquise dans un environnement structuré où il aurait testé de bonnes pratiques, en ayant une expérience internationale, tout en comprenant la dynamique d’une entreprise familiale. »

LES DIFFÉRENTES OPTIONS POUR LA SUCCESSION DU DIRIGEANT D’UNE ENTREPRISE FAMILIALE

Le dirigeant doit être un membre de la famille

Cette approche valorise la continuité et les liens les plus proches possibles entre propriétaires et direction. Elle naît du désir de « préserver le caractère familial de l’entreprise ». C’est la responsabilité de la société de garantir que les membres de la famille ayant un haut potentiel seront identifiés à l'avance et qu'on leur offrira l’opportunité de développer leur expérience dans le cadre de parcours de carrière permettant de s’assurer que le successeur sera prêt au bon moment. Cette option suppose que la gestion des talents au sein d’une famille permette d’avoir un membre familial prêt au moment opportun en conciliant les intérêts et les attentes des différentes branches de la famille. « C'est une approche purement et simplement basée sur la performance. La personne la plus talentueuse obtient le poste, sans tenir compte de quelle branche de la famille elle est issue. »

Le dirigeant ne peut pas être un membre de la famille

Dans ces sociétés, une décision délibérée a été prise de séparer la propriété de la direction, ce qui évite les conflits de famille lorsque le dirigeant familial a échoué et qu’il faut s’en séparer. Dans cette option, le nouveau dirigeant peut être issu soit de l’intérieur de la société, soit de l’extérieur, mais en tout état de cause de l’extérieur de la famille. Certaines sociétés sont même allées plus loin, en interdisant aux membres de la famille d’occuper des fonctions de cadres supérieurs « afin d’éviter les conflits entre branches de la famille et rendre la société plus attractive à l’égard des candidats externes les plus qualifiés ». Personne n’ignore qu’il est toujours compliqué de congédier un membre de l’équipe de direction qui est aussi membre de la famille. Dans les sociétés de ce type, la dissociation des fonctions est la norme, le Président étant un représentant de la famille, le directeur général un externe.

Le dirigeant doit être promu au sein l'entreprise, qu'il soit ou non un membre de la famille.

C’est l’approche la plus usuelle en termes de succession de dirigeant parmi les sociétés que nous avons étudiées. Elle priorise la stabilité, la continuité et une profonde compréhension de l’entreprise, de sa culture et de ses valeurs. Elle suppose qu’il existe suffisamment de talents au sein de l’entreprise pour apporter au conseil d’administration les options satisfaisantes au moment de nommer le nouveau dirigeant. Tout comme pour la première catégorie, l’identification et le développement anticipés, des successeurs potentiels sont essentiels, puisque la possibilité de regarder à l’extérieur est exclue.

Le dirigeant peut venir soit de la famille, de l'entreprise ou soit de l'extérieur

Ce scénario privilégie les compétences individuelles et le fait d’être prêt et apte à prendre la direction de l’entreprise. Toutes les options sont possibles et le vivier de candidats est potentiellement illimité. Il reste dans cette option une claire préférence pour la préparation d’un candidat interne dès lors que cela est possible, le conseil d’administration mettant en place un processus objectif d’identification des talents internes, familiaux et non familiaux pour les benchmarquer avec les options externes. Ainsi, peuvent se succéder à la tête de l’entreprise des dirigeants familiaux ou non familiaux.

Cette aptitude à projeter l’entreprise dans le futur est essentielle quand elle est combinée avec une vision stratégique et une capacité d’adaptation. Le futur successeur devra posséder de solides capacités intellectuelles, comprendre et anticiper les tendances du marché et développer une forte alchimie avec les autres membres de l’équipe de direction. Il doit être capable de gagner le respect du personnel, de construire une réelle affinité avec le conseil d’administration et surtout avec son président, car cette relation est indispensable pour le succès de toute l’entreprise.

Le rôle du président et du comité de nomination

Dans chacun de ces scénarios, le président non exécutif s’il y en a un, joue un rôle crucial en orchestrant le processus de succession. Certains présidents s’impliquent plus que d’autres. Ils échangent énormément avec le directeur général et la direction des RH, en s’assurant ainsi que les candidats potentiels sont identifiés, restent motivés et ont toujours des défis à relever. « En tant que Président non exécutif, je fais en sorte que moi et le conseil d’administration ayons des occasions régulières de rencontrer les dirigeants opérationnels de la société, qui sont dans le plan de succession. »

La succession du dirigeant exécutif doit être gérée par le Président du conseil et par le comité des nominations et son Président.

En prévoyant longtemps à l’avance la succession du dirigeant, il sera difficile de définir précisément les spécifications de son rôle, vu les incertitudes pesant sur l’avenir. Il est, dès lors, essentiel que le comité des nominations réévalue périodiquement les compétences et les qualités recherchées chez le futur dirigeant en fonction de l’évolution de l’environnement et de l’orientation stratégique de l’entreprise à l’horizon des 5 à 10 prochaines années.

Au-delà de la détermination des profils, le comité des nominations doit détecter les cadres supérieurs à fort potentiel dans la société et s’assurer qu’on leur donne l’opportunité matérielle de démontrer leur talent.

Le comité des nominations doit envisager la question des successions pour l’ensemble de la gouvernance. Il se peut que Président et directeur général aient à être remplacés à peu près à la même échéance. Dans un tel cas, il est important de synchroniser ces deux successions qui sont aussi cruciales l’une que l’autre pour l’entreprise.

L’organisation d’une succession ne peut pas toujours être planifiée. Si le départ du dirigeant s’effectue de manière imprévue, le conseil d’administration doit être préparé à assurer la continuité de la direction. Le conseil d’administration et son Président doivent prévoir un tel scénario, et définir des procédures qui prendront effet dans un tel cas, en ayant un scénario de remplacement d’urgence et un plan de mise en œuvre d’un remplacement durable.

Le rôle du Directeur des Ressources Humaines

Dans la plupart des entreprises que nous avons étudiées, le directeur des ressources humaines n’est pas directement impliqué dans le choix, mais joue un rôle important dans l’identification et le développement des successeurs potentiels, tout en ayant ses réseaux pour l’identification des talents hors de l’entreprise qui pourraient un jour l’intéresser.

Le directeur des ressources humaines doit être le conseil du Président et du comité des nominations en les aidant à répondre aux questions suivantes :

  • Comment définir le profil du candidat ?
  • Comment saisir les valeurs culturelles exprimées par les actionnaires et les intégrer dans le processus ? 
  • Comment être prêt à répondre aux attentes des actionnaires ?
  • Comment assister le conseil d’administration dans l’organisation de la succession ?
  • Comment évaluer le dirigeant en place ?
  • Comment aider le conseil d’administration à identifier la prochaine génération et aider celle-ci à développer ses capacités ?

Mais ce n’est pas le directeur des ressources humaines qui mènera le process. Il n’est là qu’en soutien car il s’agit de recruter son supérieur.

Préparer la future génération de leaders

Pour traiter de la question de la succession, l’entreprise familiale doit préparer la génération suivante pour faire émerger le prochain leader de l’entreprise. Identifier les leaders potentiels à l’intérieur de l’entreprise n’est que le début du processus d’organisation de la succession. L’étape la plus importante consiste à évaluer les points forts et les points faibles des candidats, et à créer un plan de carrière structuré, en fournissant des opportunités de développement personnalisées, tant pour les candidats issus de la famille que pour ceux issus des collaborateurs non familiaux.

La rotation des cadres à fort potentiel, en leur faisant assumer différentes fonctions dans différentes directions, zones et régions, doit être une pratique commune, en particulier pour les membres de la famille qui sont destinés à prendre des responsabilités.

Certains présidents pensent que parmi les membres de la famille, seuls ceux ayant le potentiel pour atteindre le sommet de l’organisation devraient être embauchés au sein de l’entreprise. Mais, détecter un tel potentiel n’est pas toujours aisé et s’assurer que les héritiers seront finalement à la hauteur relève d’une science qui n’est pas exacte. Par ailleurs, il est important de gérer les attentes et les ambitions des collaborateurs familiaux.

Pour les membres de la famille qui ont démontré le talent et le potentiel requis pour diriger, et qui sont prêts, il convient de leur confier un poste de direction de filiale et de les faire rentrer dans des conseils d’administration. « L’idéal pour les préparer au rôle de dirigeant est de les laisser peu à peu prendre de l’assurance et se former aux fonctions de direction générale en assumant de plus en plus de responsabilités », dit l’un des présidents interviewés.

Un grand nombre de sociétés familiales envoient leurs hauts potentiels suivre des Executives Programs de Business Schools. D’autres préfèrent que les jeunes membres de la famille souhaitant devenir cadre supérieur acquièrent expérience et sens critique hors de l’organisation familiale, de préférence dans une multinationale et pas nécessairement dans une entreprise familiale.

Certaines sociétés ont des critères stricts pour les membres de la famille promis à des postes à hautes responsabilités, en s’assurant qu’ils suivent le même cursus que les non familiaux.

« Dans la charte familiale, nous avons inscrit que les membres de la famille devaient avoir un diplôme universitaire et acquérir de l’expérience en management hors de l’entreprise familiale pendant au moins 10 ans. En termes de salaire, ils doivent être aux normes du marché et au même niveau qu’un non-membre de la famille pour le même rôle. »

Si l’on veut que les différentes branches de la famille continuent à fournir à la société des futurs dirigeants lorsque l’on est au-delà de la 3ème génération, il est indispensable de sécuriser l’affectio societatis de la nouvelle génération et son attachement à l’entreprise. Les différentes branches familiales s’étendant et se dispersant à travers le monde, il est de plus en plus compliqué pour ses membres de rester en contact, de se connaître, et de partager des valeurs, des objectifs et l’intérêt commun pour l’entreprise. Par conséquent, il revient aux dirigeants en place, et au Président plus que toute autre personne, de mettre tout en œuvre pour promouvoir les occasions de rassembler les héritiers autour de l’entreprise : événements, clubs familiaux, et célébrations peuvent être utilisés pour créer, développer et renforcer les valeurs familiales.

Le dirigeant et le conseil d’administration

Presque tous les conseils d’administration que nous avons interrogés pensent que le dirigeant, s’il n’est pas Président, doit être néanmoins administrateur. Non seulement un siège au conseil d’administration est une motivation importante pour un dirigeant, mais également une marque claire d’appartenance à l’entreprise afin qu’il participe pleinement aux décisions prises au sommet. Ceci garantit aussi la transparence et l’unité entre l’exécutif et le non exécutif et entre management et famille. C’est, enfin, un très bon moyen de formation.

En tant qu’administrateur, le directeur général a des contacts directs et indirects avec les autres administrateurs : « le directeur général doit faire partie du conseil d’administration pour mieux appréhender ce qui est important stratégiquement, les sujets sensibles et ce qu’ont en tête les autres administrateurs, en particulier familiaux. » Le chef du conseil de famille doit également être membre du conseil d’administration, ce qui permet au directeur général de connaître directement les préoccupations des actionnaires de la famille.

Faisons-nous le bon choix ?

La valeur ajoutée d’une évaluation formelle des candidats

Lorsqu’il s’agit de choisir le successeur qui va diriger votre société, les enjeux sont critiques. Une évaluation professionnelle des candidats finalistes, adaptée au contexte familial spécifique fournira une vision objective au conseil d’administration au moment de prendre sa décision. Même lorsque le candidat favori est un membre de la famille, il est utile d’objectiver l’analyse de ses capacités à exercer une telle fonction.

Le comité des nominations doit travailler étroitement avec le directeur des ressources humaines pour suivre de près les candidats internes et évaluer leur progression, depuis le jour où ils ont été identifiés. Il est important d’évaluer les membres de la famille avec la même rigueur que n’importe quel autre candidat postulant à un poste de directeur général. Ceci permet de maintenir la motivation chez les cadres non familiaux, de les inciter à donner tout leur potentiel et d’objectiver le choix final.

C’est là toute la valeur ajoutée d’un consultant externe utilisant une méthodologie éprouvée et objective dans un environnement qui peut souvent être assez émotionnel.

L’évaluation doit éclairer la capacité du candidat à développer de nouvelles aptitudes, à adapter son style de management en fonction de l’évolution de l’entreprise, à décoder les signaux faibles et à exercer son leadership dans un environnement mouvant.

Une évaluation efficace s’intéresse à la motivation, aux valeurs et à la personnalité, en complément des capacités et des connaissances du candidat.

Combiner les interviews basées sur l’expérience professionnelle, les questionnaires interpersonnels, les études de cas concrets, les prises de référence à 360 degrés améliore la pertinence de l’évaluation et fournit les clés pour un aperçu riche, complet, et solide de la personne

Les conseils d’administration d’entreprises familiales n’ont pas tous des administrateurs indépendants, mais nous constatons que cette situation est en train d’évoluer, car les indépendants permettent d’améliorer le bon fonctionnement du conseil d’administration, en apportant une vision extérieure et neutre.

Les administrateurs familiaux ont appris à apprécier la contribution des indépendants à la table du conseil car elle est à la fois stimulante et sécurisante.

Pour avoir un conseil d’administration équilibré dans sa composition, les entreprises familiales doivent réunir un savant cocktail entre représentants d’actionnaires engagés à long terme (la famille), représentants de l’équipe de direction (le Directeur Général et plus éventuellement le Directeur Financier) et des administrateurs indépendants de premier ordre avec au moins plusieurs dirigeants d’autres entreprises.

Quelques conseils efficaces pour la succession du dirigeant d’une entreprise familiale

  • Incorporer les principes et les procédures de succession du dirigeant dans la charte familiale.
  • Initier le processus de succession à l’avance, de préférence dès qu’un nouveau dirigeant est nommé.
  • Faire piloter le processus par le président du conseil et le comité des nominations.
  • Préparer à la fois la succession du Président et celle du directeur général si les fonctions sont séparées.
  • Rechercher la contribution des administrateurs indépendants pour apporter impartialité et objectivité.
  • Définir le profil du futur dirigeant en fonction du projet stratégique de la société.
  • Établir à l’avance si l’option d’un candidat externe est envisageable.
  • Benchmarquer les candidats internes avec des options externes.
  • Revoir régulièrement en comité des nominations, avec le Président et le directeur général, les plans de succession en termes d’identification, d’évaluation et de développement de la prochaine génération de candidats (familiaux et non familiaux).
  • Exposer les successeurs potentiels à des fonctions étendues, exercées dans des cadres variés complétés par des formations adéquates.
  • Nommer au conseil d’administration de sociétés du groupe le candidat interne pressenti pour assurer sa formation.
  • Dans la phase active de préparation de la succession (1 à 2 ans avant), faire rentrer au conseil d’administration le candidat présélectionné.

Interaction entre famille et direction générale

Dans la plupart des entreprises que nous avons étudiées, notamment les plus grandes, elles maintiennent une séparation entre direction générale et famille. « Il est nécessaire d’organiser tout cela de manière stricte et contrôlée », déclare un président. Les actionnaires ne peuvent pas interférer directement dans les questions opérationnelles de l’entreprise ou dans le processus d’organisation de la succession du dirigeant.

Généralement, il existe une ou deux occasions par an permettant à la direction et à la famille de se rencontrer. La première de ces occasions est l’assemblée générale annuelle où les résultats et les comptes sont présentés. Le dirigeant est souvent accompagné par son équipe pour communiquer aux membres de la famille les derniers éléments sur l’état de l’entreprise et sur sa stratégie, ses résultats et ses opérations. La seconde peut être une réunion de présentation ou de visite de la société pour la famille.

En complément de ces rencontres annuelles destinées à maintenir informés les membres de la famille, certaines sociétés ont créé des « clubs » pour les jeunes générations afin de développer leur sentiment d’appartenance à la famille et à son entreprise, en partageant les objectifs et l’ADN ; accessoirement, cela permet aussi d’attirer les jeunes vers l’entreprise et de leur donner l’opportunité de montrer leur envie d’y rentrer.

Conclusion

Alors que peu de tâches sont plus critiques pour une société familiale que de réussir la succession de ses dirigeants, encore trop d’entre elles n’y accordent pas assez d’importance ou ne veulent pas soulever des questions qui ne sont pas toujours faciles à régler au sein d’une famille.

Le Président et le conseil d’administration jouent un rôle pivot, en s’assurant que le meilleur processus soit suivi, en faisant converger les membres de la famille et en s’assurant d’une bonne communication à l’égard de cette dernière.

C’est un processus qui prend du temps et qui suppose que le conseil d’administration soit prêt à s’y engager, que le modèle de gouvernance soit adéquat et que la démarche soit structurée. Aligner les actionnaires familiaux avec le conseil d’administration est la responsabilité du Président.

Même si toutes les règles sont respectées, cela ne garantit pas que le choix du successeur soit le bon.

Mais un processus articulé et robuste, tel que nous l’avons décrit ci-dessus, combiné avec une évaluation professionnelle des candidats internes et externes, permet de fortement limiter les risques.

 

Pour conduire cette étude, nous avons interviewé, en collaboration avec FBN en Belgique, 25 Présidents ou Pdg de sociétés familiales de 3 à 7 générations.

Le terme « dirigeant » concerne les fonctions de Président Directeur Général ou de Directeur Général.